Pouvez-vous vous présenter et rappelez votre parcours dans le domaine de l’escalade et de la montagne ?
Je m’appelle Claude Torres, j’ai 65 ans et je suis en retraite très, très active point de vue activités outdoor ! J’ai été chirurgien-dentiste pendant 30 ans à Toulon, dans le Var. Quand mes filles ont fini leurs études, j’avais besoin de moins d’argent mais de plus de temps, j’ai alors passé le diplôme d’Accompagnateur En Montagne pour vivre au plus près de ma passion pour la montagne. En montagne, j’ai été très « escalade » (trop modeste pour le dire, c’est moi qui lui ai fait dire : en 1990 elle a était la 3ème femme au monde à atteindre le niveau 8b, après les célébrissimes Isabelle Patissier et Lynn Hill, la voie s’appelle « Sortilèges », sur la falaise du Cimaï, dans le Var) et alpinisme estival, principalement en rocher (pour les connaisseurs face Ouest des Drus, Le Nose sur El Capitan et Half Dome au Yosemite…). Plus tard, j’ai découvert l’ultra-trail, je n’étais pas très rapide mais endurante, l’engagement est tellement moindre qu’en alpinisme, j’ai fait les classiques de la discipline : Diagonale des fous à la Réunion, Ultra-Trail du Mont-Blanc, Tor des géants… Aujourd’hui, je pratique à peu près toutes les activités de montagne en fonction des conditions… D’ailleurs, après notre entretien, nous allons rééquiper quelques voies d’escalades sur la falaise de Châteauroux-les-Alpes.
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Quelle est votre activité favorite en montagne aujourd’hui ?
Ça reste l’escalade… j’ai 50 ans d’expérience ! J’ai toujours pratiqué l’escalade sous toutes ses formes, toujours amené des gens grimper et partagé des moments de vie autour de cette passion. Notre communauté est forte, les grimpeurs des années 80 sommes tous restés liés et très proches malgré les années qui ont passé… d’ailleurs beaucoup sont venus s’installer dans les Hautes-Alpes, pour la qualité de vie et les falaises ensoleillées toute l’année.
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Quelle est votre approche de la montagne ? A-t-elle évolué avec le temps et l’évolution de la société ?
Avec l’âge, je fais des choses naturellement moins engagées. Je suis aussi beaucoup moins dans la performance, je m’accepte et je m’adapte. Je me trouve chanceuse par rapport aux amis de mes 20 ans, beaucoup ne sont plus en vie… Je suis en bonne santé, je fais encore plein d’activité, et puis c’est mon tempérament, je ne me plains pas. « On ne peut pas être et avoir été ».
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D’où vient cette passion profonde pour la montagne et quel est le secret de la longévité de cette passion ?
Je ne peux pas vivre sans montagne. J’y suis bien, tout simplement. Je suis naturellement speed et dynamique, ça a toujours été comme ça. J’ai une très bonne alimentation, j’y fais attention et ça m’intéresse beaucoup. J’ai globalement une très bonne hygiène de vie.
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Pourquoi avez-vous choisi de vivre à Embrun ? Ce n’est pas là qu’il y a le plus de falaises !
Oui c’est vrai, il n’y a pas de falaises majeures à proximité immédiate… mais dans un rayon d’une heure de route il y a de nombreuses falaises de classe internationale dans des styles et cailloux variés (Ceüse, Ailefroide, Orpierre, les nombreux spots de l’argentière et du briançonnais…). Personnellement je me satisfais des très sympathiques falaises que nous avons autour de la maison. J’ai besoin de montagne et ici on peut grimper toute l’année, globalement au nord l’été et sur les faces sud l’hiver. Les Alpes du Sud, c’est le paradis des montagnards, alliance parfaite entre des conditions météorologiques favorables et la présente de nombreuses montagnes et falaises. Après le choix d’Embrun c’était le choix de la qualité de vie. Pour les gens qui aiment la montagne tous les ingrédients sont réunis : climat et météo, ville agréable et dynamisme associatif (je suis membre de l’association « forme et lumière » pour la pratique de l’aquarelle et du CAF Embrun. La qualité de vie est exceptionnelle, tout est à taille humaine, on peut tout faire à pieds : mes petits-enfants se régalent quand il viennent me voir, entre le plan d’eau, la montagne, le lac, les animations…
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Quels sont vos spots préférés ?
J’adore le Viso et le fond du Queyras. Céüse, évidemment. La falaise de Châteauroux-Les-Alpes, à 5 minutes d’Embrun. Je m’y sens un peu comme chez moi. Cette falaise était un peu à l’abandon, nous rééquipons actuellement, avec mon compagnon, plusieurs voies pour améliorer confort et sécurité.
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Avez-vous des sommets préférés ?
Le Mont-Guillaume, c’est chez moi. Je crois que j’ai arpenté tous ses versants, en toutes saisons. C’est un magnifique panorama. Également Les Aiguilles de Chabrières, avec des voies d’escalade typées montagne et un terrain propice à l’initiation à l’alpinisme, une bonne école pour la montagne. On fait souvent Le Méale, faisable par plusieurs versants et à la demi-journée, c’est le sommet pratique ! Le Pic de Morgon, évidemment mais surtout depuis mon investissement en tant que bénévole sur le Grand Trail de Serre-Ponçon… Du coup j’ai passé beaucoup de temps sur cette montagne !
Parlez-nous de cet investissement dans le milieu associatif local ?
Mon compagnon et moi-même nous investissons à la section embrunaise du Club Alpin Français (mon compagnon en est le vice-président), particulièrement les groupes escalade jeune, de 7 ans à 18 ans. C’est un gros boulot d’organisation, la gestion des inscriptions, trouver les moniteurs pour l’encadrement. La gestion de la salle d’escalade est déléguée à Pierre Lesne et ça fonctionne bien, c’est un grimpeur responsable et le succès est au rendez-vous vu la popularité de cette petite salle. Depuis l’année dernière, 2021, je suis bénévole sur l’organisation du Grand Trail de Serre-Ponçon, une superbe épreuve avec un état d’esprit top, on a beaucoup d’autonomie. Je suis responsable de la partie Embrun-Le Lauzet, en gros je fais presque tout sur cette partie : reconnaissance, balisage, débalisage, trouver les bénévoles, ce qui n’est pas une mince affaire… C’est un investissement H24 pendant les 3 jours du trail et beaucoup de préparation. C’est énormément d’énergie, encore plus cette année avec l’ouverture au coureur solo, une belle aventure en perspective ! Il y a des liens qui se créent entre les bénévoles du Club Alpin Français, ceux du Grand Trail et la communauté des traileurs.
Avez-vous des conseils à donner aux amoureux de la montagne qui viendraient découvrir Serre-Ponçon ?
L’avantage de Serre-Ponçon c’est qu’il y a des montagnes et randonnées pour tous les niveaux et les conditions sont bonnes quasiment toute l’année. On peut faire du ski de randonnée et de l’escalade dans de bonnes conditions dans la même journée. C’est un excellent camp de base pour découvrir les Hautes-Alpes en étoile avec ce « plus » non négligeable du lac, des plages et du nautisme pour la détente. Donc non, pas de conseil en particulier, juste profiter, vivez, vibrez : soyez passionné et curieux de ce qui vous entoure.